En attendant la directive Omnibus de l’UE : dernières nouvelles et prochaines étapes pour les entreprises
Le goodblog | read time: 9 min
Published: 20 mai 2025

Le changement se profile à nouveau à l’horizon européen. Alors que les entreprises commençaient tout juste à se préparer pour se mettre en conformité à la CSDDD, le paquet Omnibus est arrivé, menaçant de bouleverser une grande partie de ce qui avait été convenu précédemment.
Initialement proposé en novembre 2024, le paquet Omnibus a été publié par la Commission européenne en février dernier dans le but de simplifier la réglementation européenne en matière de durabilité. Il répondait aux préoccupations de divers acteurs qui craignaient que les règles récemment adoptées en matière de durabilité n’imposent des charges administratives trop importantes aux entreprises.
Indépendamment des arguments pour ou contre la nécessité d’une telle mesure, il ressort que des modifications de la règlementation européenne sont désormais en discussion dans un certain nombre de domaines, allant des règles en matière de finance durable, au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières et aux exigences en matière de reporting sur la durabilité.
Les entreprises devront trouver le moyen de s’adapter à ces nouveaux paramètres, identifier les opportunités d’actions et déterminer les risques auxquels elles peuvent être exposées suivant l’approche choisie.
Que propose le paquet Omnibus ?
Le paquet Omnibus a été publié sous la forme d’une série de propositions destinées à être négociées. À l’heure actuelle, seule la première proposition a été confirmée, à savoir la « directive Stop the Clock », qui prévoit des délais supplémentaires de mise en œuvre pour la directive sur le reporting extra-financier des entreprises (CSRD) et la directive sur le devoir de diligence en matière de durabilité des entreprises (CSDDD). Néanmoins, la direction prise semble claire.
Certaines des modifications les plus importantes concernent la CSDDD et sont présentées dans la deuxième proposition, la directive « Substantive Requirements », qui est actuellement en cours de négociation. Celle-ci modifierait le champ d’application de la directive de plusieurs manières.
Pour les PME, les exigences réglementaires seront considérablement réduites, tandis que les grandes entreprises bénéficieront également d’un allègement significatif. La proposition visant à limiter la “vigilance raisonnable” aux seuls partenaires commerciaux directs (niveau 1) est particulièrement notable. La réduction de la fréquence des évaluations et du suivi de ces partenaires, qui passe d’une fois par an à une fois tous les cinq ans, constitue également une modification importante.
Les grandes entreprises seront également soumises à des restrictions quant à la quantité d’informations sur la durabilité qu’elles peuvent demander à leurs fournisseurs PME. En outre, il est proposé de supprimer le régime de responsabilité civile au niveau européen, les États membres ayant la possibilité d’élaborer leur propre régime comme ils le jugent approprié. La date limite pour la mise en conformité est désormais fixée à juillet 2028.
Quelles sont donc les implications de ces changements et comment les entreprises doivent-elles y faire face ?
Limitation de la vigilance raisonnable aux partenaires de niveau 1
Dans la version initiale de la CSDDD, les entreprises étaient tenues de recenser tous leurs fournisseurs et partenaires commerciaux afin d’identifier et de signaler les domaines dans lesquels les incidences négatives sont les plus susceptibles de se produire et d’être les plus graves. Dans le cadre de la directive Omnibus, les entreprises devront toujours cartographier leurs chaînes de valeur, mais elles ne seront tenues de mener des évaluations approfondies au-delà du niveau 1 que lorsqu’elles disposent d’« informations plausibles » indiquant que des incidences négatives se produisent.
Notre conseil :
Si les entreprises adoptent cette approche restricitve de la vigilance raisonnable, elles risquent de passer à côté et de ne pas traiter les impacts graves sur les droits humains et l’environnement qui se produisent souvent plus en aval de la chaîne de valeur. Ne pas aller au-delà du niveau 1 est contraire à tous les référentiels de bonnes pratiques tels que les Principes directeurs des Nations unies (UNGPs) et les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales. Si cela peut garantir la conformité avec la CSDDD, cela ne fournit pas aux entreprises les assurances dont elles ont besoin quant à la bonne gestion de leurs risques en matière de droits de l’homme.
À ce titre, nous continuons de conseiller aux entreprises de consacrer leurs ressources à une approche proactive et fondée sur les risques en matière de vigilance raisonnable relative aux droits de l’homme et à l’environnement, allant au-delà du niveau 1 afin d’identifier et de hiérarchiser les risques les plus probables et les plus graves. Cela leur permettra de traiter les problèmes de manière préventive, plutôt que d’attendre qu’ils s’aggravent jusqu’à ce qu’ils soient signalés comme « informations plausibles ». De nombreuses entreprises ont déjà mis en place des plans complets ou prévoient de le faire ; cela reste une bonne pratique grandement recommandée, et ce malgré la directive Omnibus.
Engagement des parties prenantes
L’Omnibus réduira les attentes en matière d’engagement des parties prenantes dans le cadre de la CSDDD. Plutôt que de devoir consulter obligatoirement un large éventail de titulaires de droits, d’experts, d’ONG et d’autorités concernés, les entreprises seront uniquement tenues de consulter les travailleurs, leurs représentants et les communautés directement concernés par leurs activités.
Notre conseil :
En se concentrant uniquement sur les personnes directement concernées par les activités d’une entreprise, on risque de passer à côté de perspectives précieuses qui pourraient donner une image plus complète des impacts et servir de système d’alerte précoce pour les risques en matière de durabilité. GoodCorporation accorde une grande importance à l’engagement significatif des parties prenantes dans son travail d’évaluation et recommande que les ONG, les groupes de la société civile, les autorités compétentes et les titulaires de droits directement concernés soient inclus dans ce processus. Cela permettra de s’assurer que les causes profondes sont correctement identifiées et, surtout, que des solutions réalisables et appropriées peuvent être proposées et mises en œuvre.
Réduction des exigences en matière de surveillance
La CSDDD exigeait auparavant des entreprises qu’elles procèdent à un examen tous les 12 mois afin de vérifier l’efficacité de leurs procédures de diligence raisonnable. Dans le cadre de l’Omnibus, cette fréquence sera réduite à tous les cinq ans.
Notre conseil :
Dans un monde en mutation rapide, effectuer une diligence raisonnable tous les cinq ans signifie que les entreprises seront beaucoup plus susceptibles de passer à côté de risques émergents qui créent ou aggravent rapidement des impacts sur les droits de l’homme et l’environnement. Cela pourrait mettre en danger l’ensemble de l’entreprise. Veillez donc à mettre en place des examens réguliers de la diligence raisonnable, certainement plus fréquents que tous les cinq ans, et idéalement tous les ans.
Résiliation des relations avec les fournisseurs
La version ratifiée de la CSDDD exigeait des entreprises qu’elles mettent fin à leurs relations avec les partenaires commerciaux identifiés comme ayant des impacts négatifs graves sur le développement durable, même si cette mesure devait généralement être envisagée en dernier recours. La proposition Omnibus stipule que les entreprises peuvent suspendre leurs relations commerciales tout en collaborant avec le fournisseur pour trouver une solution, mais ne sont plus tenues de mettre fin à ces relations, même en dernier recours.
Notre conseil :
Dans la réalité, la plupart des organisations ne souhaiteraient pas continuer à s’approvisionner auprès d’un fournisseur ayant des impacts négatifs graves sur les droits de l’homme et l’environnement. Dans ces circonstances, toute entreprise devrait donc être prête à résilier un contrat, même si la nouvelle version proposée de la CSDDD ne l’y oblige pas. La menace crédible de mettre fin à une relation commerciale en dernier recours offre aux entreprises un levier précieux lorsqu’elles cherchent à corriger des impacts négatifs. De plus, les risques financiers et réputationnels liés au maintien de relations avec des fournisseurs qui ne respectent pas les normes fondamentales en matière de droits de l’homme sont tout simplement trop élevés.
La mise en oeuvre des plans de transition climatique n’est plus obligatoire
La version initiale de la CSDDD exigeait des entreprises qu’elles élaborent et mettent en œuvre un plan de transition climatique définissant des objectifs de réduction des émissions et les mesures qu’elles prendraient pour atteindre ces objectifs. Désormais, elles seraient uniquement tenues d’élaborer le plan, mais pas de le mettre en œuvre.
Notre conseil :
Il est peu utile d’élaborer un plan de transition climatique sans avoir l’intention de le mettre en œuvre, alors autant faire les deux. Les plans de transition permettent aux entreprises d’évaluer comment elles peuvent atteindre leurs objectifs, renforcent la résilience de la chaîne d’approvisionnement à long terme et encouragent la confiance des investisseurs et du grand public dans les déclarations des entreprises en matière environnementale. La mise en œuvre d’un tel plan et le suivi des progrès réalisés démontrent un engagement sérieux en faveur de l’atténuation des incidences négatives sur l’environnement, ce qui sera bien accueilli par les investisseurs et l’ensemble des parties prenantes.
Suppression du régime de responsabilité civile au niveau de l’UE
Le régime de responsabilité civile applicable à l’échelle de l’UE en cas de non-respect de la directive sur la durabilité des entreprises (CSDDD) devrait être supprimé dans le cadre de la proposition « Omnibus ». Dans la première version, les États membres auraient été tenus de prévoir une sanction allant au minimum jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires annuel d’une entreprise en cas de non-respect. Il appartiendra désormais à chaque pays de déterminer ses propres dispositions en matière de responsabilité civile et ses propres amendes.
Notre conseil :
Bien que cette mesure supprime une source importante de pression sur les entreprises, il est néanmoins dans l’intérêt de toute entreprise d’éviter tout risque de sanctions en vertu de la législation nationale ou européenne en vigueur, non seulement en raison du préjudice financier qu’elles peuvent entraîner, mais aussi en raison de l’atteinte à la réputation qui en découle. Certains États membres pourraient choisir de mettre en œuvre des dispositions spécifiques en matière de responsabilité civile, les entreprises devront donc suivre de près la transposition définitive de la directive dans le droit national. GoodCorporation continuera à suivre cette question et tiendra ses clients informés de l’évolution de la situation.
Conclusion
Bien que le paquet Omnibus propose d’assouplir considérablement les exigences de l’UE en matière de durabilité pour les entreprises, l’attention portée à leurs pratiques et à leur impact en matière de droits de l’homme et d’environnement restera intacte. Les entreprises continueront d’être soumises à la vigilance des investisseurs, des consommateurs et des organisations de la société civile, qui continueront tous d’exiger des entreprises qu’elles adoptent un comportement moins nuisible qu’avant l’introduction de la CSDDD.
Si certaines entreprises pourraient être tentées de suspendre ou de réduire leurs efforts en matière de diligence raisonnable à la lumière du paquet Omnibus, celles qui garderont leur sang-froid et continueront à suivre les meilleures pratiques reconnues en matière de durabilité, telles que définies par des cadres internationaux volontaires comme ceux élaborés par les Nations unies et l’OCDE, seront récompensées.
Une diligence raisonnable proactive et fondée sur les risques reste le meilleur moyen pour les entreprises de prévenir les effets négatifs de leurs activités sur les droits de l’homme et l’environnement et de se protéger contre les risques juridiques, réputationnels et financiers. Une telle approche aide les entreprises à atténuer les risques et à mener leurs activités de manière plus efficace et durable, tout en gagnant la confiance des parties prenantes. Adopter une approche plus approfondie et plus proactive permettra de réduire les risques pour les personnes et la planète, ce qui était après tout l’idée au cœur de la CSDDD lorsqu’elle a été élaborée. Alors continuons : les meilleures pratiques restent la voie à suivre, quelle que soit la teneur finale de la loi.
Comment GoodCorporation peut vous aider
GoodCorporation propose une gamme de services pour aider les organisations à se préparer et à se conformer à la CSDDD. De l’identification et l’évaluation des incidences négatives à l’élaboration de politiques et de procédures pour renforcer la culture de conformité, notre équipe aide les entreprises à intégrer les meilleures pratiques à chaque étape du processus de vigilance raisonnable.
Notre référentiel sur les droits humains et la vigilance raisonnable en matière d’environnement (en anglais) fournit également un ensemble de principes commerciaux responsables conçus pour renforcer la solidité des pratiques de gestion. Les organisations peuvent utiliser ce référentiel pour identifier, prévenir, atténuer et remédier aux impacts sur les droits humains et l’environnement, tant au sein de leurs propres activités que dans l’ensemble de leurs relations commerciales.
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